Le Dr Michel Lejoyeux est professeur de psychiatrie à Paris-VII, directeur des services de psychiatrie et d’addictologie des hôpitaux Bichat et Maison-Blanche. Il vient de publier « Réveillez vos désirs » (Plon).
– LE FIGARO : La capacité à espérer vous semble-t-elle en difficulté aujourd’hui ? Et si oui, pourquoi?
– Michel LEJOYEUX : Il y a, je crois, un conformisme social à être pessimiste. Mais aussi des mécanismes psychologiques: les retombées successives d’informations négatives reprises sans cesse dans les médias, la tendance naturelle à dire plus facilement des choses décourageantes, la plus grande facilité à se remémorer des événements tristes… tout cela finit par éroder nos raisons d’espérer. Et les plus anxieux d’entre nous ont une réelle porosité à ce pessimisme ambiant. Ils s’attendent au pire en permanence, tentant ainsi de le maîtriser, mais, n’amenant aucune solution, ils ne font qu’augmenter leurs hormones du stress, ce qui est toxique. Aujourd’hui, la psychologie moderne montre que seul un mélange de foi, de volonté et d’espérance – des mots qu’employait le général de Gaulle pour motiver les recrues de la France libre – peut réellement changer les choses.
– Quelles sont les conditions d’une telle forme d’optimisme ?
– Il me semble que nous avons, tous, plus d’espoir que nous ne croyons, car celui-ci tient à la force de nos désirs, et notre machine à créer du désir, si nous l’utilisons, ne s’use pas. Cependant, pour pouvoir espérer, trois éléments sont nécessaires: d’abord, il faut se sentir en sécurité ; celui qui est menacé doit d’abord se dégager d’une telle oppression. Ensuite, il faut être avec les autres, l’isolement nourrit généralement peu la capacité à espérer. Enfin, il faut avoir de la mémoire. L’espoir ne se décrète pas dans l’ici et maintenant mais naît du fait qu’ayant fait la paix avec son passé on peut se remémorer ses réussites, ses succès.
– Pourquoi nos désirs sont-ils des clés qui, selon vous, peuvent faire grandir l’espérance en nous ?
– Ce ne sont pas les désirs très «exotiques» (devenir quelqu’un d’autre, vivre dans un pays idéal…) qui nous portent le plus mais au contraire les désirs à notre portée. Ces «plaisirs minuscules» dont parlait Philippe Delerm ou La Liste de mes envies de Grégoire Delacourt nous renseignent sur ce qui fait sens pour nous, répond à nos valeurs et nous satisfait, alors que les «grands espoirs» nés de désirs impossibles, trop hauts, peuvent nous épuiser et sont souvent sources de découragement.
– Vous osez aussi dire qu’il y a une part de volonté ?
– Oui, car l’espoir est tout sauf l’attente. Il est le résultat de petits désirs qu’on parvient à porter et à vivre. Ceux-ci impliquent des moments d’attention, de conscience. La volonté est presque devenue un mot tabou en médecine ou en psychologie. De même, alors que l’espérance est notre oxygène, notre drogue en libre accès qui nous porte dans les moments difficiles, la science moderne s’en méfie autant que de la foi. Elle préfère l’appeler «optimisme» ou «anticipation positive»!
– Quel «travail intérieur» peut permettre d’y accéder ?
– Il faut déjà bien être au clair avec soi en connaissant ses désirs. Ensuite, attendre qu’on vous devine rend malheureux. Lorsqu’on a envie de quelque chose, il faut oser le demander. Exprimer ses envies, ses projets, c’est déjà les faire exister.
Par Pascale Senk – le 28/11/2014
Source : http://sante.lefigaro.fr/actualite/2014/11/28/23112-il-y-conformisme-social-etre-pessimiste
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Cet article provoque des réactions des plus vives en ligne (ça pulse un peu parfois), mais rien de dérangeant pour les optimistes convaincus que nous sommes.
Une seule « réclamation » à faire au sujet de cet article, elle s’adresse au Figaro, c’est Professeur Michel Lejoyeux et non Dr…
Merci de cette news dans ma boîte mail ce matin, les optimistes sont au top !
Sabrina